Améliorer le sommeil
Pour une personne TDI, les problèmes de sommeil sont fréquents.
D'une part par la lutte interne de certaines parties qui vont vouloir "prendre du temps pour elles", et d'autre part par la phobie des souvenirs : la peur de faire des cauchemars ou d'avoir des flash-backs.
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Nous avons très souvent peur et cherchons à éviter nos souvenirs traumatiques et c'est généralement au moment du coucher qu'ils viennent à notre esprit. Toute la journée, nous avons été occupé dans des tâches complexes comme travailler, s'occuper des enfants... c'est majoritairement nos PAN qui ont été présentes et ont agit. Lorsqu'arrive le soir, notre corps ressent la fatigue physique, nous nous relâchons... et c'est le moment ou notre cerveau se met à travailler plus intensément, à réfléchir, à analyser la journée, à rêver, notre esprit vagabonde... et laisse donc la place à nos parties traumatisées pour s'exprimer.
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Si l'événement traumatique a eu lieu la nuit (dans le noir ou au lit), on peut avoir peur du noir ou peur d'aller se coucher car des parties PE pourront revivre le fait de se coucher comme un déclencheur et avoir l'impression que cela va se reproduire cette nuit.
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Personnellement, certains de mes viols ont eu lieu la nuit, pendant que je dormais. Je suis donc souvent en lutte pour m'endormir. Je vais beaucoup tourner en rond, essayer de me lancer dans différentes activités sans pouvoir vraiment accomplir l'une de ces tâches (lire, regarder la TV, ranger, dessiner... ). Bien souvent, je m'endors avec la télé allumée dans un grand brouhaha, cela empêche mon esprit de penser et d'entendre les peurs et dialogues intérieurs des autres parties, cela me calme et me rassure.
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Il m'est arrivé, certaines nuits, quand le lendemain quelque chose de très grave était en jeu, passer devant le juge pour la garde de mes filles par exemple, d'uriner au lit de terreur. L'idée de perdre la garde de mes filles et qu'elles puissent vivre ce que j'ai vécu étant insoutenable pour moi.
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La nuit, je me sens seule et vulnérable, comme je l'étais à l'époque des viols, il est donc normal que je ressente de l'anxiété, de la frayeur ou que je sois en hyper vigilance.
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J'ai expérimenté le fait de dormir profondément et de me réveiller à de nombreuses reprises avec mon violeur sur moi entrain de me pénétrer.
Dans ces moments là on se sent complètement impuissant, on se sent piégé, on a l'impression d'être trahi par son corps qui ne nous a pas réveillé pour qu'on puisse se défendre à temps (même si cette idée est illusoire comparée à la force physique d'un adulte contre un enfant).
La morphologie du corps d'une fille ou femme fait que même si on dort sur le ventre, les jambes croisées au maximum, notre sexe est accessible. Même si on met des habits, qu'on sert les nœuds... aucune technique ne peut nous protéger et empêcher l'auteur du viol d'agir.
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Je dors très souvent le corps tout droit, sur le ventre, les jambes croisées et les bras en croix sous ma poitrine. Je le fais quand je suis angoissée, m'endormir dans cette position me soulage, c'est paradoxal car je sais que c'est la position que j'avais lorsque j'étais attachée par mon violeur, des liens aux chevilles, et des liens aux poignets. Me remettre dans cette position calme mes angoisses car c'est comme si j'arrêtais de lutter, refuser de prendre cette position c'est revivre toutes les angoisses, la terreur, la lutte que j'ai pu mener pour me défendre contre ses viols, "accepter" et "passer à l'étape suivante", le moment ou j'ai compris que lutter revient à être tuée ou battue et ou j'"accepte" d'abandonner mon corps pour survivre est "moins douloureux", "moins angoissant" pour moi.
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On peut aussi avoir testé cette technique de dormir si profondément, si lourdement qu'on espère que le violeur arrêtera si on ne se réveille pas. On peut croire que si on reste plongé dans un rêve, suffisamment profondément, ce que l'on vit n'existe pas vraiment, n'est pas vraiment en train de se passer. Certaines nuits, vous pourriez danser la gigue sur mon lit que je ne me réveillerais pas !
Et à d'autres moments, le moindre bruit, le moindre souffle me réveillera dans un état d'hyper vigilance angoissée, d'un bond je me dresserai dans mon lit, prête à la fuite comme un animal traqué et je mettrai quelques minutes à me rendre compte qu'il n'y a aucun danger...
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Mes différentes parties luttent aussi énormément pour le "partage du temps". C'est le cas pour toutes mes parties qui se vivent comme adultes (pas pour celles qui se vivent comme petite et qui réagissent uniquement à des déclencheurs).
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Certaines de mes parties veulent dessiner par exemple, dessiner est un de mes moyens pour montrer ce que j'ai vécu. Pour d'autres dessiner est interdit par mes violeurs.
D'autres parties veulent travailler sur ce site et ne faire que cela toute la journée.
Des parties veulent sortir se promener, d'autres lire, ou regarder des films… mais ces activités représentent un risque potentiel de déclencher des parties traumatisées, il faut donc éviter de le faire...
Des parties veulent que j'aille au travail pour que j'ai de quoi payer mes factures d'autres n'ont absolument pas conscience de cette nécessité et n'y voient pas d'intérêt, c'est une perte de temps et d'énergie...
Des parties veulent aller voir mes amies, d'autres y voient une mise en danger et une perte de temps.
Des parties veulent ranger et faire le ménage, s'occuper de mes papiers et démarches...
Des parties veulent être une "maman parfaite" et se dédier uniquement à mes filles...
Des parties veulent former et informer, je passe beaucoup de temps à faire des recherches sur internet, d'autres parties voient cela comme une mise en danger ou une perte de temps car ce que je lis est trop compliqué pour elles ou ennuyeux...
Des parties veulent dormir car elles se sentent épuisées en permanence...
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Je suis donc en lutte permanente sur ce que je veux faire, ce que je dois faire… dès que j'entreprend une activité, des dizaines de parties se manifestent et tentent de m'en empêcher et de faire valoir leur besoin, leur objectif, leur point de vue...
Soit je les entends râler et protester dans ma tête, soit elles m'envoient des ressentis physiques de peur, de douleur, culpabilité... Mon corps peut-être coupé en deux par une crise d'angoisse soudaine ou j'ai des douleurs très fortes au ventre, dans le dos, les bras... Ou je peux me retrouver dans un brouillard soudain, l'esprit vide, ne sachant plus quoi faire ni où je suis... Ou tomber littéralement de sommeil et m'endormir d'un coup là où je suis...
A d'autres moments, je me retrouve avec un brouhaha pas possible dans la tête. J'entends tellement de voix en même temps, des voix en colère qui m'insultent, des pleurs d'enfants...
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Et immanquablement je ressens de la colère intérieure, la frustration des parties qui ont été empêchées de faire ce qu'elles avaient décidé, les pleurs et le ressentis de parties qui culpabilisent car elles sont "grondées et jugées responsables" intérieurement, les angoisses de celles qui vivent ces luttes intérieures et ces conflits comme une mise en danger, puis le désespoir et les envies de suicide car il n'y a aucun espoir et je souffre trop... Je passe d'un ressenti extrême à l'autre en quelques fractions de secondes, en boucle.
C'est très éprouvant, fatiguant et stressant !
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Mes parties se querellent également sur "le partage du pouvoir".
J'ai un système de parties dissociatives assez complexe.
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Mes parties traumatisées dites PE viendront "au devant de la scène" agir pour ma sauvegarde lorsqu'elles se sentent en danger, dès qu'un déclencheur extérieur (une voix, un regard, un lieu...) rappelle l'un de mes traumatismes et elles vont alors refaire mes actions à l'identique du moment où j'ai vécu ce traumatisme. Etre tétanisée et ne plus bouger, fuir, hurler, me débattre...
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Mais j'ai aussi mis en place un système d'observation et d'analyse de mon environnement. J'ai des parties qui sont dédiées à ces tâches : observer et analyser, prendre une décision. Et j'ai des parties "contrôles" qui vont ainsi gérer et décider quelle partie peut venir devant et s'exprimer et agir. Mes parties contrôles autorisent ou non, bloquent les parties en fonction de l'analyse qu'elles ont faites de mon environnement.
Au travail par exemple, seules cinq ou six parties ont le droit d'être présentes en fonction des compétences dont j'ai besoin. Si je dois être ferme et autoritaire, "le mec" viendra et je parlerai avec une voix grave et autoritaire, si je dois demander quelque chose et amadouer ce sera plutôt une partie "douce et féminine", si je dois charmer pour me faire accepter, je serai plutôt "sexie et féminine, si je dois rédiger des papiers 'l'intello" sera là...
Ce "contrôle" m'aide au quotidien pour avoir accès aux différentes compétences que portent chacune de mes parties mais amène beaucoup d'incohérences dans mon comportement et je me retrouve souvent avec des moments d'amnésies sur ce que j'ai fait la minute précédente à cause des barrières amnésiques entre mes parties.
Et le soir ou le matin, je ressens et j'entends la frustration et la rage de toutes les parties qui ont été empêchées ou bloquées pendant mes journées.
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J'ai de longues périodes où je suis réveillée très tôt le matin pour faire ce qu'une partie souhaite ou pour qu'une partie me parle et que je puisse l'écouter. En ce moment par exemple, je suis réveillée tous les matins vers 4 ou 5 heure du matin pour travailler sur ce site et écrire les articles. C'est un moment où mes parties intellectuelles sont tranquilles et où je ne suis pas assaillie par les besoins et envies des autres parties. Mais du coup je dors très peu...
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Il m'arrive très souvent d'être réveillée en pleine nuit par une partie qui souhaite s'exprimer et partager ses ressentis. Elle le fait à ce moment là car elle est frustrée de ne pas avoir eu le temps ou l'autorisation de le faire à un autre moment, au travail par exemple...
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Petit à petit, à force de dialogue intérieur, de compromis, je modifie mon quotidien et mon rapport au sommeil. Nous nous mettons d'accord sur ce qui est acceptable ou non, le temps minimum de sommeil dont j'ai besoin... Et je suis aussi plus indulgente et moins en colère quand une partie me réveille ou m'empêche de dormir, j'accepte le fait qu'elle a une bonne raison de le faire, que pour elle s'est important de le faire. Mon sommeil est encore loin d'être parfait mais je ressens moins de colère, de culpabilité, de désespoir... il y a beaucoup plus de compréhension et de dialogue, et ça c'est déjà un bon début !
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