LE RÔLE DES PROFESSIONNELS SOIGNANTS
Les professionnels, quel que soit leur spécialité peuvent être des personnes qui nous sauvent ou au contraire des personnes qui nous enfoncent dans notre statut de victimes et dans le fait que nous revivions des violences.
J'ai erré toute ma vie, j'ai plus de 30 ans et en 30 ans croyez moi j'en ai vu des pros! Qu'ils soient médecins, sage-femme, kiné, dentiste, assistante sociale, gynécologue, psychiatre ou psychologue, médecin du travail, profs...
Pas un, pas une seule fois, l'un ou l'une d'eux m'a demandé si j'avais été victime de violence ou si j'en étais victime.
Il n'y a qu'il y a 3 ans que j'ai enfin trouvé une psychologue qui enfin m'a vue et entendue… Une vie entière de souffrance, une vie entière ou j'étais la proie idéale, repérable par tous les prédateurs. Grâce à cette psychologue formidable, je sors enfin de ce cercle vicieux et je commence enfin à apprendre à me défendre, me protéger, me respecter et me faire respecter.
Durant mon enfance, dans la communauté catholique sectaire dans laquelle je suis née et j'ai grandis, l'Etat lui même était complice ainsi que l'Eglise Catholique. C'était une communauté "nouvelle" accueillant des personnes en difficulté : clochards, anciens prisonniers, drogués, personnes sortant d'hôpitaux psychiatriques, migrants… et les personnes qui les accueillaient étaient des prêtres, sœurs consacrées, célibataires et familles avec enfants...
Nous étions encouragés et soutenus par l'Etat français puisque les services sociaux nous envoyaient des personnes dont elles ne savaient pas quoi faire, les assistantes sociales venaient chez nous, nous avions le droit de nous servir de la banque alimentaire pour nous nourrir...
Et l'Eglise catholique avait donné son accord pour que nous ayons le "saint sacrement" dans nos chapelles et elle nous fournissait également nos lieux de vies, nous vivions dans des anciens lieux d'Eglise dont elle ne se servait plus car trop vétustes ou trop chers à l'entretien.
Ces assistantes sociales qui venaient aurait pu enquêter, elles ont vu les bâtiments vétustes, toute petite, j'ai habité dans des grands locaux avec des trous dans les murs de ma chambre, ma mère les bouchait avec des tissus… Nous avions des sanitaires en commun avec tout le monde, on faisait la vaisselle dans les mêmes éviers où on se lavait, là ou il y avait les toilettes communes à tous. La toilette quotidienne consistait en un seau d'eau et un gant de toilette, si on devait aller aux toilettes durant la nuit, c'était dans un seau que l'on vidait ensuite le matin dans les toilettes communes, nous pouvions prendre un bain une fois par semaine, le dimanche et toute la famille se lavait dans la même eau les un après les autres.
Personne ne s'est questionné de savoir si c'était adapté pour des familles de vivre dans ces conditions…
Nous n'avions pas d'appartements séparés au début, nos chambres étaient semblables à des cellules de moines, les unes à côté des autres, les portes donnant sur un grand couloir. Les portes n'étaient pas fermées à clés, n'importe qui pouvait entrer durant la nuit ou la journée.
On mangeait tous ensemble, vivait au milieu et avec des personnes très abimées voir dangereuses…
Les adultes avaient beaucoup de temps de prières dans une chapelle éloignée de nos chambres, nous étions laissé seul durant ces temps sans presque aucune surveillance hormis une ronde de temps à autre…
Nous n'étions pratiquement pas élevés par nos parents puisqu'ils devaient travailler durant la journée pour la communauté, nous étions gardés par des sœurs, tous les enfants ensemble. Jamais personne ne s'est dit il y a un problème, c'est bizarre!
J'ai été scolarisée dans des écoles normales, jamais un professeur n'a dit quoi que ce soit. Nous étions emmenés par des sœurs ou des moines ou prêtres dans des grands fourgons, on ne pouvait pas nous louper!!! La croix, les habits de consacrés, un fourgon plein de gosses… sans parler de notre tenue vestimentaire puisque nous n'avions pas l'argent pour nous acheter des habits et que nous nous habillons avec les dons des gens. Durant toute mon enfance pas un signalement ni une enquête n'a été faite! A l'école, pas un seul professeur, pas un directeur ne s'est posé de question.
Nous déménagions souvent, pas un médecin ou un professeur ne s'est demandé pourquoi.
Nous allions voir des médecins, ces médecins pouvaient voir en consultation les personnes accueillies également, pas un médecin ne s'est dit c'est étrange que tant de personnes habitent au même endroit… Petit, nous étions souvent très malade, bronchite, otites sévères (ma sœur a perdu de l'audition à une oreille)… Nous avions tellement froid l'hiver ! Pas un médecin ne s'est inquiété de savoir dans quelles conditions nous vivions… Aucun dentiste… Et pourtant nous allions tous voir les mêmes médecins et pros…
Les assistantes sociales et l'Etat nous envoyaient des personnes en difficultés, et pourtant aucun des adultes référents dans notre structure n'était formé à accueillir et aider ce genre de personnes.
Les adultes référents et responsables qui étaient engagés dans cette communauté étaient également tous des personnes en rupture de lien avec la société, avec eux-mêmes des pathologies et des problèmes psys.
Le discours général dans cette communauté était Dieu sauve et protège, pas besoin de psys, une heure à la chapelle soignera bien mieux, nous avions LA vérité, LA solution à tous les maux et la société avait tord.
Mon père, je pense, était paranoïaque, jamais il n'a été encouragé à aller voir un psy… Il menaçait régulièrement de se suicider, disant qu'il n'était pas aimé, pas respecté… Ma mère et nous ses enfants subissions des violences verbales et physiques de sa part, il avait déjà perdu la garde de ses enfants d'un premier mariage, personne ni sa famille, ni la justice ne s'en est inquiété…
Adolescente, un de mes professeurs m'a violée, j'ai vu sur internet que d'autres victimes ont parlé mais la direction de l'école a couvert et protégé ce professeur.
A 15 ans, j'étais en grosse difficulté scolaire, j'ai redoublé ma classe, j'ai été retirée de mon école et envoyé dans une autre région de France, séparée de mes parents, celui qui signait mes résultats scolaires était le gourou de cette secte, pas un professeur de mon lycée ne s'est demandé pourquoi je ne vivais pas avec mes parents et qui était cet adulte qui me prenait en charge…
Ce gourou m'a fait venir chez lui, m'a installée non loin de ses appartements et venait la nuit me violer.
Quand la société reproche aux victimes de ne pas avoir parlé plus tôt, cela me fait hurler !
Mais que pouvais-je faire de plus ??? N'y avait il donc pas ASSEZ de signes ??? Oh oui vous vouliez prendre un flagrant délit… Il aurait fallu qu'il me viole en pleine rue devant témoins…
Et parler… comment voulez vous que j'ai suffisamment confiance, une fois assez grande pour mettre des mots sur ce qu'on me faisait, quand TOUS les adultes et pros autour, depuis ma plus tendre enfance, ne voulaient pas se poser de question et laissaient faire…
Et j'avais essayé de parler de nombreuses fois avant et le résultat avait été que ceux à qui j'avais parlé étaient devenus mes violeurs… Mon père et un prêtre et ce professeur.
Nous vivions dans de très grandes maisons pouvant accueillir une centaine de personnes, avec énormément de pièces, aucun adulte ne s'est jamais demandé pourquoi le gourou louait des logements à l'extérieur (officiellement pour travailler sans être dérangé sur ses livres et conférences), logements ou il m'emmenait pour me violer en toute tranquillité…
Le gourou recevait en entretien tous les membres de la communauté dans son "bureau" dans lequel il avait un lit. Le gourou avait dans chaque maison sa chambre conjugale avec sa femme et une autre pièce toujours bien à l'écart où il avait un autre lit pour "dormir tranquille et se reposer lorsqu'il travaillait sur ses livres et conférences".
Aucun adulte ne s'est dit que c'était étrange, alors que nous disposions de nombreuses pièces, qu'il reçoive tout le monde dans sa chambre…
Cet homme n'était ni prêtre ni accompagnant spirituel et pourtant il recevait chaque adulte et beaucoup d'enfants en "confession".
Lors de ces entretiens, je devais tout lui révéler, mes rêves, mes pensées les plus intimes, mes pêchers… Et il me violait. Si il vous convoquait en entretien vous n'aviez pas le droit de refuser et c'était un honneur, un privilège… C'était là l'exemple que me donnaient tous les adultes depuis le plus jeune âge.