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  • Writer's pictureLeelah

31/05/2021 TDI et témoignage Konbini

Une vidéo circule actuellement sur Konbini, une personne y témoignage comme ayant un trouble dissociatif de l'identité :


Cela m'énerve ! M'énerve vraiment !!

Je ne suis pas professionnel de psychiatrie, je ne suis pas à même de poser un diagnostique ni même de juger une personne et ce qu'elle vit. Je n'ai pas à interdire ni mon mot à dire sur qui témoigne sur quoi. C'est un fait et j'en suis consciente. Chacun est libre. Chacun est libre de s'exprimer et de décrire sa perception de sa propre réalité.


Mais il n'empêche que ce genre de témoignage m'exaspère au plus haut point.

Pourquoi ? Qu'est ce qui m'énerve là dedans? Qu'est ce qui me réactive à ce point ? Quels sont mes déclencheurs ?


Je dirais que le tout premier est la peur d'être réduite au silence. A nouveau. Trouver la force de parler et témoigner est un très long chemin pour un TDI, ou pour moi en tout cas ! Je suis passée par des années et des années de silence. Pas des silences volontaires ! NON !


Des silences car mon entourage, les gens que je côtoyais refusaient de me voir, de m'entendre, d'entendre ma souffrance, mon désespoir, ma détresse, mes appels à l'aide, les indices ou les paroles que j'ai pu dire ou laisser voir tout au long de mon enfance témoignant de ce que je subissais...

Des silences car la société refuse d'entendre les témoignages de violences subies dans l'enfance et est encore beaucoup dans le déni.

Des silences car mes proches, les personnes en qui j'ai mis ma confiance ont pour la grande majorité tourné les talons en entendant mon témoignage, par peur, par lâcheté, par égoïsme, par mode de survie...

Des silences car les professionnels vers lesquels je me suis tournée ont soit nié mon témoignage, soit je devais me taire et masquer mon vécu et qui j'étais car témoigner aurait pu représenter un danger pour moi (la garde de mes filles, mon divorce...)...


Des silences car intérieurement je n'étais pas prête à faire face à mon passé. J'ai mis plusieurs années à accepter mon diagnostique de TDI. Je suis moi-même passée par de nombreuses étapes, des doutes, des remises en questions. Je refusais d'accepter. Il était très douloureux pour moi de devoir accepter deux réalité qui cohabitaient en moi. Les personnes dont je dépendais enfant avaient pu être bonnes à certains moments et à d'autres me faire du mal. Ces deux réalités, ces deux vécus étaient tellement incompréhensibles que je refusais encore et encore que cela ait pu être possible. Une personne peut elle avoir dit "m'aimer", que j'étais sa "fille adoptive" et m'avoir violée, torturée en même temps ? Comment cela pouvait il être possible ? Un être humain peut il faire cela ?


Des silences car intérieurement nous nous bâtions. Le "camps" des parties qui souhaitent parler et dire, être vues contre le "camps" de celles qui ont essayé de pleins de façons différentes de parler et chercher de l'aide par le passé et portent le "savoir", la mémoire des "punitions" que j'ai subies pour avoir osé le faire. Dire et être libre contre se taire et survivre.


Pourquoi le genre de témoignage comme le fait cette femme sur Konbini me met en colère et réactive mes propres peurs ?


D'une part parce que témoigner, pour elle, semble être très facile, très "marrant". Tandis que moi, lorsque je témoigne je suis envahie de batailles internes avant, pendant et après mon témoignage. Sa liberté est comme une claque qu'elle me met en plein visage.


Ensuite car cela réactive mes propres sentiments de honte interne et de culpabilité. Je ressens souvent de la honte lorsque certaines parties dissociatives viennent et s'expriment devant des personnes extérieures. Lorsque je perds mes compétences car l'une de mes parties petites s'est réactivée et vient devant, après j'ai honte !! Je ressens de la honte de m'être comportée comme une petite fille.

Je ressens de la colère interne parce que j'ai peur de m'être présentée vulnérable et fragile devant quelqu'un et cela réactive mes peurs de m'être mise en danger, cette personne a pu ou pourrait en profiter et me faire du mal. Cela réactive ma colère interne aussi de mes parties intellos qui détestent qu'on ne croit pas en leurs capacités, leurs compétences, leurs qualités et ont peur qu'on nous prenne pour une abrutie ou une débile, une folle...


Cette femme présente les "switchs" entre parties comme quelque chose de "fantastique", de "rigolo" mais ma réalité, la réalité de mes switchs est bien différente ! Elle est faite de souffrance, de douleurs physiques, émotionnelles, de voix et pensées qui envahissent ma tête et mon corps et sur lesquels je n'ai parfois aucun contrôle ! C'est très effrayant, très éprouvant et fatiguant !!!


Pour réussir à témoigner sur ce site, il m'a fallu plusieurs années avant que mes parties acceptent que nous le fassions sans que je n'en sois empêchée ou que je sois envahie par des crises d'angoisses et de terreurs gigantesques! Témoigner n'est pas marrant ni rigolo pour moi. C'est un combat, une lutte, une victoire au jour le jour... Une victoire au jour le jour sur mes bourreaux qui ont inculqué la peur de parler et la croyance que je suis en danger permanent... C'est une victoire chaque jour pour me dire "aujourd'hui c'est fini, aujourd'hui je suis libre, aujourd'hui je ne subis plus rien, aujourd'hui je suis en sécurité"...


Ce que j'ai envie de dire c'est :

Le TDI m'a permis de survivre dans une secte, de survivre à de multiples violences quotidiennes dans cette secte. Ce n'est pas un truc branché. Je ne suis pas toute pimpante et maquillée. Je ne me mets pas en scène ! Un TDI ça se voit sur le visage, les micro expressions, la gestuelle, la posture du corps et ce que l'on dit mais c'est très subtile majoritairement caché... Il faut de nombreuses années de pratique pour un psy pour le détecter. Un TDI c'est un CAMOUFLAGE !!! Une façon de survivre.


Pour que des parties dissociatives se forment chez une personne avec un trouble dissociatif de l'identité c'est que la personne subit un traumatisme d'une telle violence, d'une telle horreur, un événement qui la submerge tellement que pour pouvoir continuer à vivre, pouvoir survivre, son identité se scinde. Une partie pour continuer la "vie normale" et "oublier", une partie qui porte ce vécu, cet événement atroce et inimaginable, indigérable, qu'on ne peut pas assimiler dans notre mémoire...


Mes parties dissociatives ne sont pas apparues un jour et d'un coup comme si d'un coup je me serais mise à changer de style vestimentaire, de maquillage, de coiffure... Je switch toute la journée, très souvent. Mais je garde les mêmes habits, je ne me maquille pas et je ne change pas de coiffure. Les gens que je croise et qui ne sont pas au courant que j'ai un TDI ne peuvent pas s'en rendre compte.


Mes parties dissociatives m'ont toutes sauvées.

J'ai survécu parce qu'on s'est réparti la douleur entre parties dissociatives, parce qu'on a oublié et mis de côté les vécus les plus atroces pour pouvoir continuer à vivre... parce qu'on s'est réparti les stratégies de survie selon les violeurs qu'on côtoyait....

C'est ça la réalité d'un TDI. Ce n'est pas un jeu !


Et présenter le TDI de cette façon, pour moi, c'est l'invisibiliser et le décrédibiliser et nier la souffrance qui y est associée.


L'invisibiliser car du coup les personnes TDI, les signes extérieures qu'elles pourraient montrer et qui permettraient qu'elles sortent de la solitude et des silences ne seraient pas vues, reconnues puisqu'elles ne ressembleraient pas à cette caricature !


Le décrédibiliser car c'est un peu ridicule, risible, marrant ou fantastique, sensationnel... Et du coup soit les gens s'en feront une image négative en disant que nous simulons ou sommes des affabulatrices, des comédiennes. Soit ils en auront une image "positive" très imaginaire qui serait très éloignée de ce qu'est la réalité du quotidien et de la souffrance que peut ressentir une personne TDI !


Le TDI est incroyable ! Pas dans le sens magique, super héros ou ce genre de chose ! Mais incroyable comme force de vie et de survie ! Nous avons survécu au pire, à des choses atroces, douloureuses, invivables ! Et nous méritons que notre force et notre courage soit reconnu à sa juste valeur !!!

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