Quand j'ai commencé ce site, j'ai demandé à plusieurs personnes de mon entourage d'être mes "gardes fous". Qu'ils "me surveille", et veillent à ce que je n'écrive rien qui me mette en danger. Je leur demandais de relire mes post et de me les valider.
Je n'avais pas confiance en moi, j'avais peur d'écrire des choses qui pouvaient être mal interprétées ou mal comprises, de dire des choses qui auraient pu me mettre en danger... J'avais besoin de "gardiens" pour me rassurer.
Petit à petit j'ai pris confiance en moi, j'ai moins fait appel à ces "aides" pour valider ma légitimité à témoigner de ce que je vivais.
Depuis toute petite, dans la secte, on m'a inculqué que parler de nos besoin est interdit, parler de ce qu'on ressent (surtout si c'est négatif) est interdit et que critiquer ou remettre en cause est interdit.
Il m'est encore très difficile de le faire, et c'est au prix de beaucoup de souffrance intérieure que je parviens à le faire !!!
Les "histoires de Ellen Lacter" que j'ai lues avec ma psy m'ont aidé il y a quelques mois à me libérer de tout cela. Mes parties dissociatives portant ces frayeurs de "mourir si je parle" ont commencé à se libérer de ces interdits. Je n'étais plus entravée pour libérer ma parole.
Concrètement, avant cela, je pouvais écrire ce que je pensais puis tout effacer d'un coup saisie d'une crise d'angoisse terrible. J'avais mal au ventre, envie de vomir, j'étais tétanisée, je me mettais à entendre dans ma tête des pleures, j'avais des douleurs dans les bras, le dos... Tout cela était tellement envahissant et douloureux que je faisais machine arrière et je supprimais tout.
J'avais des angoisses de mort imminente, j'entendais dans ma tête des parties dissociatives me dire que parler est interdit, critiquer est interdit... Je me mettais à penser que j'étais nulle, que je n'avais aucune légitimité à penser ce que je pensais et encore moins à en témoigner... Je me rabaissais. Quand je ressens cette angoisse, j'ai tendance à ne plus manger ou presque, et je cherche à tout prix à échapper à ces ressentis envahissant. En les ignorant ou en utilisant des moyens pour les occulter. Je peux me plonger dans une tâche ou faire en sorte de mettre un bruit qui couvre (mettre la musique à fond ou un film à fond) de sorte que je n'entende plus mes pensées angoissées qui tournent dans ma tête...
Voilà ce qu'était mon quotidien.
Puis, il y a eu ces histoires d'Ellen Lacter. Cela a été une aide formidable pour moi et mes parties dissociatives. En quelques mois, mon comportement s'est modifié. Mes parties dissociatives petites ont accepté de les écouter. Et elles ont commencé à changer leur façon d'agir. Lorsque je faisais des choses ou disais des choses (exprimer mes besoins, dire ce que je pensais, exprimer des réserves ou des critiques sur certaines choses...), je ne me réactivais plus, j'entendais dans ma tête mes pensées qui disaient "ils ont menti, on est en sécurité maintenant, on a le droit de dire, dire c'est pas mal, on est en sécurité..." ... Et par dessus tout, je ne ressentais plus de douleurs physiques, d'émotions fortes de terreur ou de culpabilité. Je ne pensais plus de phrases négatives à mon encontre.
Tout cela recommence. Mes deux derniers post génèrent en moi beaucoup d'angoisse.
A chaque notification sonore de mon téléphone, ma toute première pensée est une bouffée d'angoisse que je sens physiquement. J'ai comme une boule dans mon ventre, et des ondes d'angoisses et de peur qui envahissent mon corps et des scénarios catastrophes traversent mon esprit. C'est ma psy qui m'appelle pour me crier dessus et m'interdire de dire ce qu'on ressent. J'ai peur, j'entends des pleurs dans ma tête, et j'entends ces phrases en boucle : "avoir critiqué c'est mal ! J'ai pas le droit de critiquer ! C'est grave ! Ce que je fais est grave et mal ! Je vais être punie ! Je vais souffrir !".
Et je sens les combats reprendre à l'intérieur de moi. Parler ou ne pas parler? Laisser toutes les parties s'exprimer ou non ?
Comment vous expliquer ?
Il y a des moments vous avez une opinion. Vous êtes sûr de vous et vous voulez vous exprimer... Mais imaginez que vous êtes à cet instant ou une sorte de bouffée d'adrénaline vous envahie où vous vous dites "c'est le moment je dois parler". C'est un moment dans notre tête où les choses sont claires, on sait ce qu'on pense, les arguments en faveur de ce qu'on pense sont limpides et se bousculent dans notre esprit... Je vie la même chose sauf que en l'espace de quelques secondes, je vais être capable d'avoir une opinion et quelques secondes d'avoir l'exacte croyance inverse. C'est épuisant. Je suis l'une puis l'autre. Intégralement. Une minute, je suis persuadée que décrire ce que je vie au quotidien, expliquer mes luttes et combats internes est primordial. Je veux témoigner, je veux informer... Puis la minute d'après, je suis persuadée que le faire ne sert à rien, que le faire est dangereux, je ressens des douleurs, des émotions fortes... Puis à nouveau, je me dis que je ne fais rien de mal, que je suis en sécurité. Qu'exprimer ses opinions n'est pas mal et interdit. Que le faire est important. Puis à nouveau je suis coupée en deux.
C'est très effrayant ! D'une part parce que faire le yo-yo émotionnellement ainsi est épuisant physiquement. Puis parce que j'ai vraiment l'impression que ma vie est un brouillard... Qui suis-je ? Qu'est-ce que je pense et veux au final ? J'ai l'impression d'être une coquille vide ballotée au coeur d'une gigantesque tempête. J'ai l'impression de n'avoir aucune prise sur quoi que ce soit. Je ne sais même pas ce que je pense alors si je ne sais pas ce que je pense quelle légitimité ai-je à parler et dire aux autres ? Je ne suis rien, je n'existe pas.
Puis des pensées dépressives. Je ne suis rien. Je devrais disparaître. Personne ne veut entendre. Cela ne sert à rien. Je suis seule.
Puis de la colère contre moi-même. Si je n'avais pas ces putains de pensées qui me bloquent, ma vie serait bien plus simple. Je m'en veux, je blâme mes parties portant mes "interdit à parler". Je suis nulle. C'est leur fautes !! Sans elles, je serais libre !
Puis le doute. Est ce que tout cela est vrai, est ce que je n'invente pas tout ça. En fait je suis folle. Si je faisais comme si tout cela n'existe pas, ma vie serait plus simple. Si j'oubliais tout, ma vie serait plus simple. Il faut nier tout, il faut oublier tout. Je ne veux pas souffrir. J'en peux plus de ces conflits internes. Je ne veux plus souffrir!
Puis des douleurs physiques, des pleures dans ma tête, des hurlements... Des parties qui hurlent. Elles sont là. Je ne peux pas nier. Je ne peux pas occulter.
A nouveau le désespoir. Comment faire? Je ne vais jamais y arriver. C'est trop dure!
Et ainsi en boucle... Colère, désespoir, tristesse, volonté, calme et paix, culpabilité, besoins affectifs, colère et refus d'exprimer, tristesse, doute, colère, acceptation, tristesse, volonté de parler, culpabilité, colère, désespoir.... Chacune des minutes de ma vie est ainsi.
J'ai un TDI. Un putain de TDI. Et c'est ma PREUVE. La preuve de ce que j'ai subi, de ce qu'on m'a fait. Ma vie est un putain de tourbillon.
Un autre exemple concret :
Her j'ai publié un post ainsi que un autre il y a quelques jours. Des gens m'ont contacté pour m'encourager. Lorsque j'ai lu leurs gentils mots, les quelques premières minutes de lecture, je me suis dis "mais de quoi ils parlent?". Je ne me souvenais plus d'avoir écrit. Je ne me souvenais plus que j'ai eu des moments cette semaine où j'étais triste. En lisant leur encouragements, j'avais un sentiment d'étrangeté, d'irréalité. Il m'a fallu quelques minutes pour que les souvenirs me reviennent en mémoire. Mais j'étais comme détachée de ce vécu que j'avais partagé. Aujourd'hui, je ne ressens pas de désespoir. J'ai quelques pensées négatives qui se succèdent mais pas ce gros désespoir qui m'a envahi pendant plusieurs heures durant la semaine passée. Cette "réalité" est comme un rêve un peu trouble dans mon esprit. Quelque chose que j'ai vécu mais dans lequel je ne me reconnais pas vraiment aujourd'hui...
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