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Photo du rédacteurLeelah

23/12/2021 TCC

J'ai un autre "devoir" à faire pour mon suivi en techniques cognitives et comportementales.

Je dois répondre à des questions sur mon passé et ce que cela révèle de mon fonctionnement habituel.


La première question est : qu'est ce qui est essentiel pour moi (valeurs, fiertés, qualités)?

Cette question est compliquée pour moi car beaucoup de choses s'entremêlent. J'ai des valeurs qui me viennent de la secte et que je tente de modifier et adapter à la vrai vie en société, les décortiquer pour comprendre les fausses croyances inculquées et arrêter d'y obéir... Et j'ai des valeurs qui me sont propres.

Mes valeurs :

-Je suis quelqu'un de très droit. Tenir ses engagements, la loyauté sont très importants pour moi. En soit, ce sont de bonnes valeurs mais elles ont pour moi une connotation très sacrificielle venue de la secte. Dans la secte, les engagements étaient à vie, on donnait sa vie à la secte, même si on s'affaiblit, même si on souffre, même si on n'est pas heureux, on devait continuer à donner encore et encore. Et cela avait un côté très don de soi, sainteté... Et je suis un peu là-dedans encore aujourd'hui. J'ai du mal à comprendre que j'ai des devoirs mais aussi des droits. Que si je suis malheureuse ou épuisée, j'ai le droit de dire stop, non... Pour moi c'est perçu comme de la lâcheté, de l'égoïsme, de l'échec, de la faiblesse... C'est pour cette raison que faire mes démarches de reconnaissance de nullité de mon mariage ont été très importante pour moi. J'avais besoin d'être reconnue, que quelqu'un reconnaisse que mon mariage avait été arrangé par la secte et que l'échec de celui-ci n'était pas de mon fait. Malheureusement, la justice ne permet pas ce genre de démarche. Le statut de divorcé est le même pour tout le monde, il n'y a aucune distinction entre mariage et mariage arrangé dans la loi et la déclaration de divorce.

-Etre une bonne mère, à l'écoute de mes filles, protectrice. Etre là pour elle, les sauver. Et c'est ce que j'ai fait depuis toutes ces années, j'ai lutté du mieux que je pouvais pour les protéger et les éloigner de la secte.

-Etre quelqu'un qui voit et qui agit. J'ai peur de me rendre compte un jour que j'ai agi comme les adultes de la secte, que j'ai vu et n'ai rien fait, que j'ai fait comme si rien ne se passait sous mes yeux. Je refuse d'être lâche comme eux, égoïste comme eux.

Mes fiertés :

-Pour cela j'ai du mal. J'ai tendance à me rabaisser ou à ne pas me rendre vraiment compte de mes qualités, de ce que j'ai traversé et de la difficulté de ce que cela a été, de l'énergie que cela m'a demandé. J'ai du mal à me comparer aux autres et me situer par rapport à eux.

-Je peux être occasionnellement fière de moi-même quand j'ai passé une journée de boulot épuisante, où j'ai couru partout et réussi à tenir un rythme infernal sans me laisser dépasser. Je me sens alors fort et puissant et j'aime beaucoup cela. C'est surtout ma partie dissociative "le mec" qui ressent et apprécie cela.

-Etre fière de soi a pour moi une connotation de péché, d'égoïsme et c'est quelque chose que j'ai plutôt tendance à repousser et occulter en moi.

Mes qualités :

-Là encore, c'est un sujet délicat. Dans la secte, on pouvait avoir des qualités mais celle-ci devaient être dite par le gourou ou certains membres. En être conscient soi-même et s'en vanter était mal perçu et vu comme un péché d'orgueil. Il fallait être humble, se mettre au service des autres, et être reconnaissant quand le gourou voyait des qualités en nous et nous attribuait un travail ou une tâche en fonction de ces qualités qu'il percevait. Se vanter de ses qualités revenait à être banni ou à perdre le droit de les exploiter. Si nous voulions faire une chose dans laquelle nous étions "bon" ou que nous aimions, il fallait se taire et être humble. Il était également dangereux d'être trop félicité par les autres membres de la secte car alors le gourou pouvait s'en offusquer et nous punir en nous mutant parce que nous prenions trop de place ou trop d'importance. Il le faisait pour notre bien. En tout cas, c'est ainsi qu'il le présentait...

-Je crois être capable de m'adapter très rapidement à une situation nouvelle, comprendre très vite les règles du groupe, son fonctionnement et m'y adapter. Lorsque je rencontre quelqu'un pour la première fois, très rapidement, je cherche en l'observant quelle partie dissociative doit interagir avec cette personne, quelle partie est la mieux adaptée... J'arrive très vite à me mettre à la place de l'autre, le comprendre. Mais cela me joue des tours car j'ai tendance à effacer qui je suis vraiment, à ne plus savoir qui je suis et ce qui est important pour moi. Et j'ai aussi du mal à mettre un cadre et mes propres limites dans la relation car comme je me mets à la place de l'autre en permanence, j'ai tendance à comprendre pourquoi il ou elle est ainsi et lui trouver en permanence des excuses.


Quelles sont mes règles de vie ?

-Je crois que le seul mot qui me vient est la SURVIE. Je dois survivre et m'adapter pour survivre.

-Tenir mes engagements en tant que maman, être une "bonne mère", une "bonne compagne", une "bonne employée". Me conformer à ce qu'on attend de moi, comme dans la secte... Mon quotidien, ma cognition sont encore tellement imprégnés de la notion de sacrifice, de "don de soi" inculqués dans la secte... Et cela me désespère !


Qu'est-ce que je redoute, quels sont mes schémas conditionnels?

-J'ai peur de mourir, d'être punie pour avoir mal agit. Ceux sont là des pensées liées aux menaces que j'ai subies durant mon enfance.

-J'ai peur que par ma faute d'autres meurent. Là encore, les menaces du gourou de faire du mal à ma famille si je n'obéi pas sont encore très présentes. Et la culpabilité que je ressens vis-à-vis du suicide de mon frère renforce encore cela. Il est mort par ma faute, si je m'étais tue, si je n'avais pas fuis la secte, il serait encore en vie... Mes démarches de porter plainte ont beaucoup réveillé ces croyances et je dois énormément lutter contre. J'ai très peur que mes filles meurent, ou ma sœur ou ma mère car je porte plainte.

-Je redoute d'être seule, abandonnée. J'ai peur de vivre seule car c'est très difficile pour moi, j'ai toujours grandi entourée de centaine de personnes dans la secte. D'un côté je m'y sentais invisible, morte, inexistante au milieu de plein de monde et d'un autre être seule signifie être rejetée par le groupe, être une paria qui disparaît des mémoires. Une personne qui était rejetée par la secte disparaissait de nos mémoires, des albums photos communautaire, on n'avait plus le droit d'en parler, on devait faire comme si on ne les connaissait pas...

-J'ai peur d'être seule car cela signifie que je ne suis pas une personne qu'on peut aimer. Si personne n'est mon ami, c'est que je ne suis pas digne d'être aimée. D'un côté je recherche désespérément à être aimée, d'une façon presque mendiante, suppliante. Et de l'autre je fuie les liens d'amitié car j'ai toujours été abandonnée et je m'attends à ce que cela se reproduise dans toutes mes rencontres. Pour me protéger je fuie donc ces liens pour ne pas souffrir encore une fois. Je le recherche et je le fuie...

-J'ai peur de ne pas être en couple avec un homme. J'ai la croyance très ancrée que si je n'ai pas un homme dans ma vie, le gourou va me tuer. J'ai besoin de la protection d'un homme pour rester en vie. J'ai besoin de la présence d'un homme dans ma vie pour me guider, me dire ce que je dois faire, comment le faire... Tout cela est lié au gourou et à l'emprise qu'il a eu sur moi ainsi qu'à la vision très misogyne du couple, de la sexualité, de la famille que la secte, mon père et le gourou m'ont inculqués. Je sais pourtant pertinemment que depuis que j'ai quitté la secte, j'ai survécu seule, en prenant mes propres décisions. Je m'occupe seule de l'éducation de mes filles. Je n'ai besoin de personne pour me dire quoi penser ou comment prendre mes décisions. Malgré tout, je me sens en danger si je ne suis pas en couple et j'ai l'impression que je ne parviendrai à rien sans un homme qui me guide. De plus j'ai très peur financièrement de ne pas survivre. Ne pas avoir les revenus nécessaire à notre survie mes filles et moi, ne pas réussir à gérer mon argent et j'ai la croyance que si je suis seule à assumer financièrement, je vais me retrouver à nouveau dans la situation dans laquelle j'ai été un peu après avoir quitté la secte. En caravane à mourir de faim et de froid. Et je suis terrorisée. Pourtant, depuis que j'ai quitté la secte, je me suis toujours débrouillée pour avoir un travail, un appartement, une voiture... Et je subviens à mes besoins et ceux de mes filles seule. La présence d'un homme à mes côté est perçue comme un filet de sécurité indispensable pour moi.

-Je redoute qu'un jour mes filles me disent qu'elles ont subi des violences et que je n'ai pas été capable de le voir et les mettre en sécurité. Cela voudrait dire que j'ai reproduit ce que ma mère a fait avec moi et j'ai très peur de cela. Je ne veux pas être ainsi. Je veux voir, je veux entendre. Pour l'instant, elle ne m'ont rien dit et j'ai fait tout ce que je pouvais pour les protéger. Lorsqu'elles me parlaient de situations inadéquates à l'école ou dans leur quotidien, je suis toujours intervenue. Je leur ai appris à voir les situations dérangeantes et anormales, à parler, à faire confiance à ce qu'elles ressentaient...


Quelles sont mes solutions pour m'adapter, mes schémas conditionnels ?

-Je me sacrifie. Je passe après les besoins des autres. Pour rester en couple, j'ai tendance à oublier mes propres limites et mes propres besoins car je me dis que si j'exige des choses, la personne me quittera. Pour être une bonne mère, j'ai tendance à être uniquement mes parties dissociatives "maman" et à oublier mes besoins pour satisfaire ceux de mes filles. Pour garder mon travail, je me donne à fond, même si je sens que je suis au bord du burn-out, car je crois que si je montre mes faiblesses, mon patron ou ma patronne ne voudra plus de moi.

-Je me dissocie, chacune de mes parties dissociatives a un rôle, une fonction à remplir. Ainsi cela me permet de ne pas entendre mes autres besoins, mes autres pensées, mes autres croyances... Je fais comme si je ne ressentais rien, comme si je n'existe pas. Tout ce que j'ai à faire c'est accomplir les tâches qui m'incombent, accomplir les rôles que la vie me donne, continuer ainsi à avancer coûte que coûte. Si je m'arrête, je meurs ou des gens que j'aime meurent par ma faute.

-Je m'adapte à chaque situation. Je ne fais pas de vrais choix. Je m'adapte à ce que les circonstances ou la vie me proposent à l'instant T. Sans vraiment réfléchir et me poser pour me demander de quoi ai-je besoin, qu'est-ce qui m'aiderait ou me ferait du bien? Du coup mon quotidien est toujours bancal, inadapté. Et je me sens toujours en échec et avec une vision pessimiste du monde et des liens avec les gens. Je sais ce dont j'ai besoin, un environnement compréhensif et bienveillant. Pouvoir ne plus cacher, masquer mes parties dissociatives. Avoir du temps pour apprendre à prendre soin de moi. Et je suis forcement déçue par mon entourage et mon quotidien car il ne répond pas à ces besoins fondamentaux pour moi...


Quelle est l'image de moi qui m'effraie, le pire, mes schémas inconditionnels ?

-Ce que j'ai le plus peur est que mes violeurs gagnent. Qu'ils réussissent à me tuer, me faire taire à tout jamais, me faire renoncer.

-De me tuer par un excès de désespoir de l'une de mes parties dissociatives. J'ai peur du désespoir que je ressens parfois avec l'impression que si je le laisse s'exprimer, je vais me noyer dedans...

-Etre perçue comme folle ou menteuse, affabulatrice. Qu'on ne me croit pas.

-Disparaître, être invisible, que personne ne me voit.

-Que l'on me déteste ou me haïe.

-Etre une personne mauvaise, faire le mal, reproduire ce que l'on m'a fait. J'ai très peur qu'on m'assimile à mes violeurs et aux actes abjectes qu'ils m'ont fait.

-Etre une mauvaise mère, lâche et aveugle qui préfère sa propre sécurité et son propre bien-être à celle de ses filles.

-Retomber dans un mouvement sectaire, me faire à nouveau manipuler et ne pas m'en rendre compte.

-Ne pas réussir à me libérer de mon passé, échouer à me guérir et continuer toute ma vie à obéir à des déclencheurs qui me force par des fils invisibles à agir comme une marionnette comme je l'ai fait dans la secte. Ne rien contrôler de ce que je vie, ressens, pense, crois...

-Laisser parler ma colère et ma haine et ne plus rien contrôler.

-Etre immobile, voir, entendre mais être incapable d'agir, me défendre, me protéger comme cela m'est souvent arrivé. Etre spectatrice de ce qui arrive à mon corps, être impuissante.

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