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Photo du rédacteurLeelah

20/09/2020 La découverte du bonheur


Depuis plus de 3 ans, avec l'aide de ma psy, j'essaie de faire comprendre à mes parties dissociatives l'intérêt de partager des instants de bonheur et de joie dans mon quotidien.


J'ai dû beaucoup batailler pour réussir à sortir dehors et me promener dans la nature. J'avais des parties dissociatives qui dès que je sortais, se réactivaient et me replongeaient dans des traumatismes que j'ai vécu dans le passé. Je sortais en forêt et je revivais automatiquement les viols subis au début de mon adolescence par un prêtre dans une forêt. Je luttais constamment intérieurement. Je voulais sortir dans la nature, j'aimais cela et ça me faisait du bien mais en même temps, à chaque fois que je le faisais, j'étais mal, je souffrais...


J'avais aussi des parties dissociatives très jeunes qui avaient peur d'aller dans la nature et sortaient très régulièrement me croyant en danger et se réactivant. Elles voyaient des serpents dangereux dans toutes les herbes hautes, des chiens menaçants qui me poursuivaient, des ombres, des hommes cachés derrière les arbres qui allaient m'attraper et me violer... J'étais dehors, je travaillais et d'un coup j'étais envahie par la terreur d'être attaquée, mordue, tétanisée, impuissante à empêcher...


Sortir m'étais impossible car synonyme de souffrance physique et émotionnelle très intense.


Certaines de mes parties dissociatives luttaient aussi beaucoup contre le fait de "prendre soin de moi". Elles avaient intégré au fil des années les règles et interdits de mon père et de la secte. Prendre soin de soi, écouter ses besoins et envies, écouter son corps lorsqu'il dit "je suis fatiguée, j'ai besoin de repos..." . Tout cela m'était très difficile !

Je ressentais beaucoup de culpabilité à le faire, de la colère intérieur, j'entendais des phrases assassines et culpabilisantes en boucle dans ma tête (phrases et injonctions de mes violeurs dans le passé). Des choses très simples et anodines comme prendre un bain, faire une sieste, regarder la télé, lire un livre, s’asseoir et ne rien faire... Tout cela était très compliqué à faire pour moi et source de mal être et ressentis angoissants.


Faire des courses, m'acheter des choses que j'allais posséder ensuite, avoir de jolis habits... Acheter des meubles pour que mon appartement soit douillet et que je m'y sente bien... Tout cela était source de conflit, de culpabilité et réenclenchait mes mécanismes inculqués par mes bourreaux d'auto censure. Avoir quelque chose à moi est interdit, posséder des choses pour mon propre bien-être est mal, Dieu allait me punir, je suis égoïste et mauvaise...


De la même façon, je m'imposais une conduite exemplaire dans le maintien de propreté de ma maison, dans ma conduite et l'image que je donnais extérieurement en tant que maman, que femme... Je ne devais montrer que une image de femme parfaite, toujours souriante, heureuse, enjouée, disponible... J'étais incapable de dire non, je suis fatiguée. Ma maison devait être toujours propre, bien rangée. Préparer des repas parfaits, équilibrés lorsque je recevais des amis... J'étais comme un arc tendu, épuisée mais incapable de montrer mes failles et mes faiblesses.


Au travail, dans tous les postes que j'ai occupé, je m'imposais la même rigueur. Si un employeur avait la bonté de m'embaucher, je lui étais redevable à vie et je me donnais à fond et ne pouvais pas mettre des limites à mon implication dans l'entreprise. Je n'arrivais pas à séparer temps de travail et vie personnelle. J'avais grandis avec l'exemple omniprésent dans la secte où les limites entre vie familiale et vie communautaire n'existaient pas. Quand on s'engageait dans la secte, c'était pour toujours et tout le temps.


Lorsque mes parties ne sont pas d'accord quand je fais quelque chose, intérieurement, c'est insupportable ! J'entends des parties qui pleurent dans ma tête, constamment, j'entends des cris, des hurlements. Je ressens par vagues les ressentis émotionnels de mes parties dissociatives : peurs, culpabilités, angoisses de morts, détresse, dégoût de moi, rage, colère, désespoir... mon corps est alors plongé dans un chaos émotionnel intense. Mon cœur se met à palpiter, j'ai mal au ventre, je ressens une fatigue très intense, j'ai envie de me faire du mal pour me punir, je me recroqueville par terre sur moi-même, j'ai envie de vomir, de pleurer, de hurler...


A présent, je commence vraiment à m'écouter intérieurement.


C'est assez drôle !

Le week-end depuis quelques mois, je n'ai plus à batailler pour inciter mes parties à sortir dans la nature, me baigner, me promener... Cet été a été le tout premier été où j'ai vraiment profité de mes vacances et ressenti de vrai et entier moments de bonheur.

Mes parties dissociatives "petites" ont bien compris l'intérêt de vivre ce genre de moment. Et à présent je dois plus expliquer intérieurement la nécessité de travailler la semaine et le fait que je ne puisse pas passer toutes mes journées dehors au bord d'une rivière à profiter du soleil... Lorsque je dois aller travailler, je les entends râler dans ma tête. Elles me disent que dehors leur fait du bien, elles sentent enfin ce qu'est vivre sans être constamment dans la souffrance et la douleur et sont donc en colère que je leur impose des tâches qu'elles jugent ennuyeuses ou fastidieuses et me reprochent le fait de les maintenir dans la souffrance alors qu'une solution existe à leur mieux-être.


L'une de mes psys m'avait dit une phrase que je garde en moi : "Soyez douce avec vous-même". Cette phrase, pendant des semaines, des mois, je me la suis répétée en boucle dans la tête. A présent, mes parties l'ont intégrée.


Lorsque je suis fatiguée, je dors. Lorsque je souhaite faire en sorte de me sentir bien et en sécurité chez moi, j'écoute mes parties et je décide avec elle de ce qui me permettra de l'être. Au travail, j'ai informé mon patron de mon TDI et avec son accord, je décide de mon emploi du temps. Parfois, beaucoup travailler m'aide à me sentir bien et à me maintenir dans la réalité de l'ici et maintenant. Parfois, je suis incapable de rester concentrée sur le présent car très envahie par le partage de mes traumatismes et il m'aide en me mettant à faire des tâches physique (où je me dépense physiquement) où me met à travailler en extérieur. A d'autres moments, il me permet de rentrer chez moi et me reposer et me laisse la liberté de prendre mes rendez-vous avec ma psy comme je le souhaite...

Je m'appuie beaucoup plus sur ma famille pour m'aider dans mon quotidien avec mes filles.

Je fais beaucoup moins attention au jugement des autres et à leur opinion.


Ce qui a permis cela est que mes parties dissociatives ont accepté le fait que je suis dissociée et que intérieurement je n'ai pas une seule et unique envie, un seul besoin. Je ne lutte plus ou beaucoup moins lorsque je veux faire quelque chose et que j'ai des blocages. J'ai enfin compris que si cela bloque intérieurement, c'est pour une bonne raison et que ce blocage ne pourra cesser que lorsque j'aurais écouté. Ensuite, nous pouvons décider de ce qui est bon pour nous.


Toutes mes parties sont reliées. Tant que l'une d'elles souffre et se croît encore en danger de mort ou sur le point de souffrir, d'être punie, toutes les autres le ressentent et en sont affectées. Etre heureuse, en paix, se sentir bien, se sentir en sécurité... est un long apprentissage qui passe par comprendre les mensonges inculqués par les bourreaux, différencier le passé du présent et expérimenter dans le quotidien d'autres vécus, des vécus positifs, bienveillant...


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