Cette semaine était atroce ! Beaucoup de partage de souvenirs traumatiques. Beaucoup de conflits internes. Des crises d'angoisses très régulières et très fortes.
Voilà ce que j'entends dans ma tête, c'est la voix de la femme du gourou :
"Tu es folle ma pauvre fille ! Dieu va te sauver! Dieu fera partir le démon de toi! Tu vas voir! Son messager sur terre mettra ses mains en toi et fera sortir la bête ! Il extraira le malin de ton corps pour que tu ne parles plus avec la langue fourchue du mensonge. Laisse toi faire ! Laisse toi faire ou on t'attachera ! Soit une gentille fille! On t'aime ! (Le nom du violeur) t'aime ! Laisse toi guider, laisse toi pétrir par la main du messager de dieu."
C'est l'histoire de Jade.
Jade elle aimait bien faire les papiers. Jade elle aimait bien dessiner sur les papiers.
Jade a dessiné sur les papiers ce que les cruels lui faisait et elle a montré à sa maman. Sa maman en a parlé aux cruels parce que elle s'inquiétait que jade dessine ça et que jade arrive pas à dormir le soir. La femme du cruel a dit à maman que c'était la culpabilité du survivant. Que c'était à cause de la mort de sa sœur.
Puis les cruels ont gardés les dessins.
Le cruel a pris le dessin et l'a mis sur le visage de jade. Il a dit que les papiers c'est pas bien, que jade est vilaine, que les papiers c'est interdit. Et a chaque fois ils enfonçait très fort son zizi dans le kiki de jade et il remontrait le dessin et il refaisait mal à jade. Plein plein de fois. Jade pleurait. Jade a promis de plus refaire les papiers. Jade a supplié. Jade avait très mal. Jade voulait que ça s'arrête.
Voilà ce que le gourou m'a fait, a fait à l'une de mes parties dissociatives, Jade. Toutes ma vie j'ai eu du mal à faire les papiers. Je ne comprenais pas pourquoi lorsque je devais faire des démarches, immédiatement et systématiquement, je ressentais de l'angoisse et de la terreur, souvent j'étais empêchée d'agir. Quelque chose, je ne savais pas quoi, m'en empêchait. Une menace planait, je ne savais pas l'identifier, la nommer mais quelque chose de grave allait m'arriver si je faisais ces papiers.
Cette semaine j'ai été empêchée à mon travail de faire les "papiers". Dès que mon patron me demandais de m'en occuper, je faisais une crise d'angoisse. J'étouffe, je n'arrive plus à respirer, j'ai envie de vomir, j'ai mal au ventre, je pleure... Et j'ai cette croyance qui revient en boucle : si je fais ces papiers, par ma faute mon patron va mourir, je vais mourir, je suis en danger de mort, mon patron par ma faute va aller en prison si je fais les papiers. Jade est mauvaise, elle écrit des choses pas bien sur les papiers, elle ne doit pas le faire, si elle le fait, elle va envoyer des gens en prison et c'est mal.
J'ai eu envie d'arrêter mon travail à plusieurs reprises. J'ai même demandé à ma psy de parler à mon patron, de lui expliquer que si il me fait faire les papiers c'est dangereux pour lui, que par ma faute il va aller en prison. Je la suppliais. Je ne veux pas faire de mal à mon patron, je ne veux pas qu'il soit punie par moi.
Je sens encore de l'angoisse aujourd'hui et j'ai eu quelques crises d'angoisses ce matin mais je suis moins perdue dans le temps. Jade (ma petite partie dissociative) est moins présente que ces 2 derniers jours. Quand elle est là, c'est atroce, je souffre !!!! Ce qu'elle a vécu est horrible. Je suis alors incapable de discerner la "réalité", le passé, du présent. Je suis incapable, je ne peux plus toucher ces papiers. Si je le fais, je vais mourir, je vais souffrir, on va me punir, je vais faire du mal à ceux que j'aime ou apprécie.
Je suis incapable de me rendre compte que faire des "papiers" ne met pas les gens en prison, ne va pas les tuer ou me tuer. Tout ce que je sais c'est que là, au moment où ce partage a lieu, je suis violée, je souffre énormément et j'entends ces injonctions du violeur. Je les intègre dans mon cerveau. Si je recommence les papiers, il me refera mal. Les papiers c'est interdit, les papiers c'est dangereux. Les papiers c'est mal, les papiers ça fait du mal au gens, ça les envoie en prison. Les papiers c'est interdit.
Comme je vous l'ai dit sur un autre post, avec ma psy, depuis plus d'un mois, nous avons commencé à travailler en thérapie sur les "fausses croyances" de mes parties dissociatives qui se croient encore enfants.
Voici l'une de ces croyances.
Le rôle de Jade dans mon système de partie est de me protéger en m'interdisant de faire les "papiers" car si je le fais, je vais être punie.
Je sens aussi beaucoup de résistances à l'intérieur, beaucoup de conflits par rapport à ce travail que nous faisons avec ma psy. Des parties ne sont pas d'accord d'aider ces parties dissociatives à comprendre ce qu'on leur a fait et les mensonges qu'on leur a dit, elles ont peur pour différentes raisons. Certaines ont peur du partage et ne veulent pas qu'on le fasse, elles ont peur de souffrir, elles ont peur de savoir. Certaines ont peur qu'en faisant cela, elles perdent leur rôle dans mon système et ne sache plus quel but elles doivent suivre, quel objectif de sauvegarde elles doivent adopter si elles aussi croient des choses erronée.
Ce que je me rends compte aussi c'est à quel point rien n'est adapté dans notre société pour aider des personnes comme moi. On est seul, absolument seul pour affronter les pires moments de notre vie. Et rien n'est fait pour nous aider à passer ces étapes nécessaires à notre guérison.
Je vois ma psy. Oui. Mais comment je guère les crises d'angoisses quand je ne suis pas dans son cabinet ? Qui m'aide à respirer quand en plein milieu de la nuit je me réveille et que je ressens ce viol vécu il y a des années comme si il était en train de se passer ? Qui m'aide quand au boulot je vomie et que je suis terrassée par la terreur ? Qui m'aide minutes après minutes dans ma journée à me relier à mon présent et ne pas me noyer dans mes souvenirs traumatiques ? Qui m'aide à résoudre les conflits et les hurlements, les pleurs que j'entends dans ma tête jours et nuits depuis une semaine ?
Tout cela est injuste !! Vous n'avez pas idée à quel point c'est une torture ! Vous ne savez pas ce que ça fait d'entendre hurler et pleurer à longueur de journée. Vous n'avez pas idée à quel point c'est épuisant, angoissant. A quel point c'est couteux en énergie de montrer un visage neutre et impassible, à sourire, à faire comme si je n'entendais rien, ne ressentais rien toute la journée.
J'ai une double peine. J'ai été violée, torturée et puisque personne ne m'a protégée, je suis obligée de le revivre encore et encore jusqu'à enfin l'intégrer. Et pour faire cela, je suis seule, ou presque. Ma famille, ma psy, mon patron sont là. Ils disent "ne t'inquiète pas, tu as les compétences, tu vas y arriver, ça va aller..." et tout ce que j'ai envie c'est leur hurler dessus. Vous ne savez pas ! Vous ne ressentez pas ! Vous n'entendez pas à quel point c'est horrible ce qu'ils m'ont fait.
Je voudrais tellement que vous ressentiez, que vous soyez dans mon corps. Vous comprendriez ! Et lorsqu'ils me disent que non, faire des papiers ne va pas me tuer, faire des papiers ne va pas mettre en prison des personnes, j'ai juste envie de leurs hurler dessus !
Comment pouvez vous dire cela ? Comment puis je vous croire quand je le vie dans ma chaire ? Faire ces papiers reviens à ressentir ce qu'il m'a fait, je le sens, je SENS dans ma chaire tout ce qu'il m'a fait. Comment pouvez-vous dire que ça ne tue pas, ça ne fait pas mal ? Ma réalité à moi c'est ça. J'ai fait les papiers et je SUIS violée, torturée. Leurs paroles me blessent. Ils disent que ce que je ressens et vie est faux, n'existe pas là en ce moment mais ma réalité, mes ressentis sont tout autre !
Quand le partage s'arrête, je suis capable de voir, de comprendre, de discerner les différences. Mais lorsqu'il a lieu, je ne suis que douleurs et nier ma douleur, nier mes ressentis c'est une violence de plus.
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